Chapitre d'épistémologie 2007
Corbel, P. ; Denis, J.P. et Payaud, M. « Ago-antagonisme positivisme/constructivisme : quelques formes de travail épistémique » in A.C. Martinet, Sciences du management – Epistémique, pragmatique et éthique, Vuibert, Paris, février 2007, p.261-284
Résumé (introduction) :
Comme le montrent les études bibliométriques, l’ouvrage Epistémologies des Sciences de Gestion publié en 1990 est devenu une référence incontournable pour les chercheurs francophones en management stratégique [1]. Par la qualité des contributions et efforts d’approfondissement qu’il a inspirés, force est de reconnaître qu’il a contribué à placer la réflexion épistémologique au centre des débats en sciences de gestion et singulièrement en management stratégique.
L’ouvrage était présenté comme « une balise, une première, un envoi » (p.X). Effectivement, la plupart des travaux se réclamant d’une posture constructiviste s’y réfèrent explicitement. Charreire et Huault [2] montrent cependant que ses principes et ses exigences ne sont pas toujours clairement compris ni intégrés dans les travaux, en particulier doctoraux.
Ceux-ci en retiennent souvent l’idée selon laquelle cette attitude vis-à-vis de la production de connaissance se justifie principalement par son opposition à la posture positiviste associée à la figure d’Auguste Comte. Cependant, il y était proposé qu’en stratégie, seul l’entretien sur la durée d’une attitude dialogique (au sens d’E. Morin) entre postures à dominante disjonctive et analytique d’un côté, synthétique, holiste et à visée d’aide à la conception de l’autre était susceptible de produire des connaissances simultanément praticables et robustes [3].
Dans ces conditions, il serait dommageable d’en rester à une opposition trop tranchée qui, si elle n’était pas dépassée, porterait le risque d’en devenir stérile. Ce chapitre propose d’étayer cette thèse et surtout de la prolonger par une réflexion sur les modalités concrètes de dépassement du clivage positivisme / constructivisme inspirées des principes de la systémique ago-antagoniste développée, depuis plus de quinze ans, sous la conduite d’E. Bernard-Weil.
Après une analyse approfondie des motifs du clivage positivisme / constructivisme, conduisant à justifier son dépassement dans le cas du management stratégique, trois voies pour y parvenir seront successivement présentées. Toutes font appel aux concepts centraux de la systémique ago-antagoniste comme celui d’équilibration (au sens de J. Piaget) et de maintien en tension dynamique de couples réputés opposés. Les trois pistes esquissées ont pour point commun de vouloir aider à la gestion de cette tension. La première propose d’appréhender le processus de production de connaissances d’intention scientifique comme un flux oscillant entre des dominantes épistémiques de natures différentes. La deuxième propose que le recours à la production de configurations constitue une voie fertile pour gérer le couple simplification / complexification et ainsi aider l’activité de conception. La troisième, analyse les apports potentiels d’une approche en termes de systèmes propositionnels.
[1] Boissin, J.P. ; Castagnos, J.C. et Guieu, G. (2001) « Ordre et désordre de la pensée stratégique » in Martinet, A.-C. et Thiétart, R.-A., coord., Stratégies – Actualité et futurs de la recherche, Vuibert, p.27-42
[2] Charreire, S. et Huault, I. (2002) « La recherche constructiviste en sciences de gestion : quelle cohérence épistémologique ? » in I. Dostaler, H. Laroche et O. Boiral (dir.), Perspectives en management stratégique - tome VIII, Management & Société, p.265-279
[3] Martinet, A.-C. (1990b) « Epistémologie de la stratégie » in A.C. Martinet (dir.), Epistémologies et Sciences de Gestion, Economica, p.235.
Lien :
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